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31 mars 2011 4 31 /03 /mars /2011 18:21

MÉMOIRE DE JOSE LUIS BLASCO FERNANDEZ SOUTENU DEVANT LA REAL ACADEMIA DE BELLAS ARTES DE SAN FERNANDO (ESPAGNE) LE 12 MAI 1964 AU SUJET DU TABLEAU DE VELAZQUEZ INTITULÉ LES MÉNINES - RÉSUMÉ. 

  

[NOTE PRELIMINAIRE : Le mémoire, qui devait servir d'examen final à l'étudiant Jose-Luis Blasco Fernandez, a été rejeté par le jury. Tous les exemplaires papier ont été détruits. Ce résumé, rédigé comme une note de travail, a été retrouvé dans archives personnelles de l'auteur à la suite de son décès, survenu le 14 juin 2010. Les annales de la Real Academia de Bellas Artes de San Fernando ne comptent aucun autre cas de mémoire rejeté avant ni après celui-ci. A la suite de cet échec, José-Luis Blasco Fernandez a quitté la carrière de la critique artistique pour devenir employé aux espaces verts de la ville de San Carlos de la Rapita (Province de Catalogne)].

 

 

 

 

 ménines

 

 

 

 

Le tableau de Diego Rodriguez de Silva y Velazquez intitulé selon les époques Les Ménines ou Les demoiselles d'honneur ou La famille de Philippe IV ou Les suivantes, est considéré comme le chef d'oeuvre du peintre et l'une des plus célèbres toiles au monde. Elle est aussi parmi les plus complexes à interpréter car l'une des plus énigmatiques.

Il s'agit d'une scène de cour a priori ordinaire où l'on retrouve la famille royale avec, au premier plan l'infante Marguerite, qui semble capter sur elle toute la lumière du tableau. Le couple royal est seulement représenté par son reflet dans un miroir situé au fond de la pièce et à peu près au centre du tableau, tandis que le peintre lui-même se représente dans une semi-pénombre, légèrement en retrait – inutile de s'étendre, le tableau est célèbre.

 

L'idée communément admise, et que je vais réfuter dans ce mémoire, est la suivante : Velazquez a voulu représenter, grâce à ce reflet nimbé de lumière dans le miroir, la grandeur et la munificence du couple royal, l'aura quasi mystique de la royauté ; Velazquez est un proche du roi, il lui aurait ainsi rendu un hommage portant à la fois sur sa fonction et sur sa personne.

 

On s'est par ailleurs beaucoup interrogé – des centaines de pages ont déjà été rédigées à ce sujet – sur la composition du tableau, sa perspective, la possibilité ou l'impossibilité qu'il y a à ce que le reflet dans le miroir, et avec lui l'ensemble de la scène, représente la réalité de la vision de l'oeil du peintre.

 

En vérité, comme nous le verrons, tout ceci est d'une importance relative ; de même, la question de la place du spectateur, qui a agité tant de savants et produit une somme considérable de commentaires censément éclairés, ne doit pas être considérée comme primordiale.

(Développer les thèses antérieures)

 

Ce mémoire va s'attacher à démontrer la thèse originale selon laquelle ces éxégèses doivent trop aux conventions de notre temps, et surtout à l'idée que l'on se fait de ce que doivent être les relations entre un peintre et son souverain dans le 17e siècle espagnol.

(Bref rappel historique Moyen-âge17e)

 

En réalité toute la complexité de ce tableau tient dans la dualité des intentions du peintre.

 

 

En apparence, mais en apparence seulement, l'interprétation commune – j'allais dire vulgaire – figure dans le tableau –, et c'est bien la volonté de Velazquez de la lui voir figurer, une façon pour lui de détourner les mauvaises intentions qu'on aurait pu lui prêter. Velazquez devait se protéger, se rendre, en quelque sorte intouchable.

 

Mais le tableau avoue une toute autre lecture pour peu que l'on veuille bien s'adonner à un brin d'anticonformisme. Ce que nous dit le peintre dans la figure qu'il nous donne à voir de lui-même, ce que sa moue tend à nous faire comprendre, c'est que cette présentation n'est qu'une représentation : représentation de l'étiquette, des conventions et des convenances – comme une carricature, pourrait-on dire si le terme n'était anachronique –, une représentation conditionnant la survie même du peintre, entendons sa survie matérielle. En tant que peintre officiel cette représentation est un passage obligatoire sous peine de renvoi à une vie de médiocrité, un renvoi synonyme de fermeture du robinet à ducas – c'est un peu trivial j'en conviens mais la création artistique ne s'est jamais dédouanée de ce genre de contingences ; un renvoi, enfin, débouchant même – cela s'était déjà vu – sur des poursuites, l'exil, la relégation, l'oubli et – plus terrible encore – l'anonymat.

 

Ceci explique le regard du peintre.

 

 

 

velazquez2

 

 

 

 

Nous n'y lisons pas autre chose que du mépris envers les autres personnages présents.

 

Car le regard du peintre n'est pas destiné à sa toile mais au spectateur, et ce regard il faut l'interpréter, au risque de passer à côté de ce qui fait l'essence de la toile.

 

La position de Velazquez à la cour lui assurait à la fois un confort de vie et les plus hautes protections du royaume. Pour autant, il ne devait ces avantages qu'à son seul talent. Il était le plus grand peintre de son époque et le savait. La preuve est dans le tableau lui-même. Certes il se représente dans une demi pénombre mais il se représente au dessus de tous les autres personnages du tableau : les autres ne doivent leur position qu'à leur naissance, lui la doit à son travail et à sa création ; à ce titre il se considère comme supérieur.

 

Du roi et de la reine, on ne distingue que les reflets, et le reflet n'est pas la réalité, il est une vision de la réalité, une image floue et imprécise. La vérité du monde est dans l'art et non dans le politique ou la gouvernance. Le couple royal a les traits brouillés, ceux du peintre sont nets ; le pouvoir est un leurre, dit Velazquez, un piège tendu par le malin pour garder les hommes attachés à la matière.

 

C'est ainsi que le peintre établit la primauté de l'artiste sur le souverain, car : la vérité du monde est dans sa représentation.

 

 

La vérité du monde est dans sa représentation.

 

 

(A développer :)

 

L'exercice du pouvoir relève du domaine terrestre, celui de l'art, du domaine divin.

 

Le pouvoir relève du futile, l'art, de l'essentiel.

 

Le pouvoir relève du temporel, l'art, du spirituel.

 

Le pouvoir relève du présent, l'art, de l'éternité.

 

L'exercice du pouvoir relève du hasard, celui de l'art de la volonté.

 

 

 

Et si le peintre a cherché à détourner le regard du spectateur vers une ligne de fuite située au fond du tableau, vers la porte, ça n'est que pour mieux affirmer ce qu'il avait à dissimuler : sa mégalomanie.

 

Seul un très grand artiste pouvait y parvenir.

 

 

 

 

 

 

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